Appel de textes pour un numéro thématique : Didactique et pédagogie en aménagement flexible

2021-01-19

Appel de textes pour un numéro thématique : Didactique et pédagogie en aménagement flexible

Coordonnateur du numéro : Jonathan Bluteau, professeur au département d’éducation et formation spécialisées, UQAM

Texte de cadrage

Les gouvernements investissent des sommes sans précédent afin de construire les écoles de demain selon des orientations architecturales qui se fondent sur des espaces ouverts, flexibles, modulables et laissant entrer la lumière naturelle. Ces aménagements physiques offrent des espaces permettant le choix, le mouvement, plusieurs options d’assises selon diverses postures (assis, debout, couché) et favorisent la socialisation des enfants entre eux et avec l’enseignant·e. Cet intérêt marqué pour l’aménagement physique des écoles et les nouveaux espaces d’apprentissage suggère l’existence de limites de l’aménagement ordinaire fixe (c.-à-d., un pupitre par élève) ou celles des architectures d’école traditionnelles (école avec casiers dans les corridors, espaces fermés, peu d’ouvertures vers l’extérieur, etc.). En effet, l’environnement physique peut exercer une pression, voire des contraintes (stresseurs), qui sont susceptibles d’influencer les pratiques pédagogiques, les interactions entre les élèves, la capacité à manipuler les objets de savoir, la capacité à se réguler, etc. En somme, ces contingences de l’environnement pourraient entraver ou soutenir l’enseignement et l’apprentissage. Ainsi, plusieurs enseignant·es se tournent actuellement vers le modèle des « classes à aménagement flexible » (flexible seating) afin de faire face aux besoins complexes et hétérogènes des élèves et favoriser un climat de classe propice aux apprentissages (McKeown, Stringer et Cairns, 2015; van den Berg et Cillessen, 2015). Au Québec, il n’existe pas de statistiques officielles à propos de l’implantation des classes flexibles, mais on peut estimer ce nombre à plus de 2000 classes sur le territoire. Cela dit, ce modèle d’organisation de la salle de classe est très peu, sinon pas abordé en formation initiale des enseignant·es.

Les données empiriques dans ce champ sont peu nombreuses, mais de plus en plus, on les voit émerger. À ce jour, les études ont montré que certains paramètres de l’environnement physique (lumière naturelle, espace, qualité de l’air) affectaient la qualité du contexte d’apprentissage, modulant ainsi la concentration et la réussite scolaire des élèves (Barrett, et al., 2017). Dans la majorité des écrits, les effets mesurés sont exprimés en termes de performance scolaire (en français et mathématiques). Cependant, les pratiques enseignantes sont rarement abordées, et les observations rapportées ne sont pas concentrées sur les élèves ou l'enseignant·e dans leur relation à l’espace et dans leurs interactions. Ceci constitue une limite des études existantes.

Les différents types d’aménagement de la classe

La classe fixe

La classe dite fixe (voire traditionnelle) se caractérise par une disposition relativement statique des pupitres. En règle générale, la classe fixe dispose de pupitres individuels où chacun des élèves a une place qui lui est attribuée. La disposition spatiale des pupitres, dépend du choix de l’enseignant.e. Les bureaux peuvent être placés en rangées, ou en regroupements.

L’aménagement physique de la classe en rangées est souvent associé à une meilleure gestion de classe et à un meilleur engagement à la tâche puisque l’attention est portée sur l’enseignant·e, tout en favorisant la tranquillité et le travail individuel (Legout, 2017; Wannarka et Ruhl, 2008; Burgeson, 2017), mais à notre connaissance, aucune étude ne soutient solidement cette idée, et cela reste de l’ordre des croyances chez les enseignant·es. Selon certaines études, les pupitres placés en regroupement permettraient de faciliter les échanges, la collaboration (Wannarka et Ruhl, 2008) et les interactions sociales (Farmer, Lines et Hamm, 2011; Gest et Rodkin, 2011). Cependant, dans la classe fixe, les modifications spatiales momentanés des pupitres sont relativement limitées et la reconfiguration de la classe pour une activité pédagogique est loin d’être systématique.

La classe flexible

Depuis quelques années, nous voyons apparaître dans le paysage scolaire le concept de classe flexible (flexible seating). On constate que les bureaux alignés ont fait place à une plus grande diversité dans les assises (fauteuils, vélo stationnaire, tables ajustables, tabourets oscillants etc.). Les élèves font donc des choix personnels et stratégiques entre différentes surfaces de travail, tailles et hauteurs d’assises, positions corporelles, mais aussi de zones d’apprentissage (Havig, 2017; Laquerre, 2018). La classe est aménagée en espaces adaptés aux objectifs pédagogiques et aux types de comportement attendus : zone de lecture, zone de concentration, zone de collaboration, zone d’évaluation, etc. Basée sur le précepte qu’architecture et pédagogie doivent aller de pair pour créer un environnement d’apprentissage positif (Hébert et Dugas, 2019). Par la disposition spatiale et la diversité de son mobilier et des équipements mis à disposition, la classe flexible est réputée favoriser le désir d’exploration des élèves (Abassi, 2013; Mazalto, 2017). L’environnement physique devient alors un support éducatif. De nombreuses études s’accordent à dire que la classe flexible est davantage à l’écoute des besoins physiques, sociaux et cognitifs des élèves (Limpert, 2017; Legout, 2018; Sorell, 2019; Abassi, 2013). Or, un environnement physique est épanouissant et favorable au sentiment de bien-être, notamment lorsque cet environnement permet de répondre aux divers besoins des élèves (besoin d’intimité, de sécurité, de socialisation, d’autonomie, etc.) (Joing et al., 2018). Pour répondre à cet objectif de créer un environnement d’apprentissage positif et favorable au bien-être des élèves, la classe flexible repose sur cinq fondements : le choix (1), le mouvement (2), le confort (3), la vie en communauté (4) et la coopération (5) (Havig, 2017; Limpert, 2017; Laquerre, 2018).

Or, comme le soulignent Wannarke et al. (2008), l’aménagement physique de la classe devrait s’accorder à la nature de la tâche scolaire et au type de comportement souhaité. De ce fait, ça ne serait pas tant la disposition spatiale qui devrait constituer un enjeu, mais plutôt l’aménagement physique relativement statique de la classe, et par conséquent, le manque de flexibilité.

De nombreuses études ont souligné que la plupart des enseignant·es ne disposeraient pas nécessairement des connaissances, des habiletés ou de la formation pour exploiter efficacement l’environnement (Lackney, 2008; Abassi et Fisher, 2010; Imms et Byers, 2017; Limpert, 2017) ou ne seraient pas conscient·es des dimensions psychologique, sociale et pédagogique de l’environnement (Germanos, 2009; Lackney, 2008; Kessler, 2017).

Numéro thématique

Ainsi, les articles inclus dans ce numéro thématique apporteront un éclairage sur l’influence des aménagements physiques de la classe sur les pratiques pédagogiques et l’apprentissage des élèves. Dans ce contexte, le présent appel de propositions de la revue Didactique a pour thème « Didactique et pédagogie en aménagement flexible ». Lors de la pré-soumission, sera considérée toute proposition respectant les balises de la revue (https://revuedidactique.uqam.ca/index.php/revuedid/about) et s’intéressant à l’influence de l’aménagement flexible de la classe sur les pratiques pédagogiques et les apprentissages des élèves dans le cadre d’une recherche que celle-ci soit expérimentale ou descriptive, de recherche-développement ou de recherche-action.

Modalités de soumission

Les propositions d’article (3 pages maximum) devront être envoyées au coordonnateur du numéro à l’adresse suivante : bluteau.jonathan@uqam.ca avant le 15 mars 2021 Cette étape de pré-soumission permettra aux personnes auteures de vérifier la qualification possible de leur texte avant une formelle soumission à la revue. Merci d’indiquer pour chaque proposition le nom et le rattachement institutionnel des personnes auteures.

Dates importantes 

Date butoir de réception des propositions :   15 mars 2021

Retour des avis aux personnes auteures :  1er avril 2021

Envoi de la 1ere version de l’article à la revue (par la plate-forme de soumission) : septembre 2021

Retour prévu des évaluations de l’article : novembre 2021

Parution prévue : décembre 2021

Pour connaître les exigences particulières de la revue, consultez le site https://revuedidactique.uqam.ca/

Références

Abbassi, N., et Fisher, K. (2010). A research review of the impacts of learning environments. Learning Environments Applied Research Network. University of Melbourne.

Abbasi, N. (2013). Organisation de l’espace scolaire et formation de l’identité chez les adolescents: Une analyse de quatre établissements secondaires en Australie. Revue internationale d’éducation de Sèvres, (64), 133‑145. doi: 10.4000/ries.3626

Barrett, P., Davies, F., Zhang, Y. et Barrett, L. (2017). The holistic impact of classroom spaces on learning in specific subjects. Environment and behavior, 49(4), 425-451.

Burgeson, S. (2017). Flexible seating influencing student engagement. (Mémoire de maîtrise, Collège Northwestern, Orange City, IA). Accessible par NWCommons.nwciowa.edu. Tiré de https://nwcommons.nwciowa.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1055&context=education_masters

Farmer, T. -W., Lines , M. -M. et Hamm, J. -V. (2011). Revealing the invisible hand : The role of teachers in childrens’ peer experiences. Journal of Applied Developmental Psychology, 32, 247-256.

Germanos, D. (2009). Le réaménagement éducatif de l’espace scolaire, moyen de transition de la classe traditionnelle vers une classe coopérative et multiculturelle. Synergies Sud-Est Européen, (2), 85-101.

Gest, S.-D. et Rodkin, P. -C. (2011). Teaching pratices and elementary schools peer ecologies. Journal of Applied Developmental Psychology, 32, 288-296.

Havig, J. -S. (2017). Advantages and Disadvantages of Flexible Seating (Thèse). Dakota du Nord : Minot State University.

Hébert, T. et Dugas, E. (2019). L’évaluation de la dimension architecturale des établissements scolaires récents. Enquête sur le ressenti des collégiens. Tréma, (52), 1‑19. doi: 10.4000/trema.5460

Joing, I., Vors, O., Llena, C. et Potdevin, F. (2018). Se sentir bien dans chacun des lieux de l’espace scolaire au collège: Le rôle de l’autonomie, de l’appartenance sociale, de la perception du lieu et du sentiment de sécurité. Spirale - Revue de recherches en éducation, (61), 19. doi: 10.3917/spir.hs2.0019

Imms, W. et Byers, T. (2017). Evidence concerning the impact of classroom design on teacher pedagogy, and student engagement and performance in mathematics. Learning Environments Research, 20(1), 139 – 152.

Kessler, M. (2017). Aménagement de la classe et pédagogie différenciée : comment les enseignants utilisent l'espace pour favoriser une différenciation de leur enseignement (mémoire de maîtrise). Lausanne : haute école pédagogique.

Lackney, J. A. (2008). Teacher environmental competence in elementary school environments. Children, Youth and Environments, 18(2), 133‐159.

Legout, M. (2018). La classe flexible au service de la motivation, de la dynamique de groupe et de la différenciation. (Mémoire de maîtrise, Université de Bordeaux, Bordeaux, FR).  Accessible par ESPE d’Aquitaine.

Laquerre, G. (2018). Nouvelle ère pour l’environnement d’apprentissage chez les élèves au primaire : Les classes flexibles, plus qu’un simple aménagement, un cheminement réflexif (mémoire de maîtrise). Université du Québec à Trois-Rivières.

Limpert, S. -M. (2017). A qualitative study of Learning spaces at Midwest Elementary School and its relationships to student attitudes about reading. (Thèse). Missouri : Lindenwood University.

McKeown, S., Stringer, M. et Cairns, E. (2015). Classroom segregation: Where do students sit and how is this related to group relations? British Educational Research Journal, 42(1), 40-55.

Sorrell, M. A. (2019). Perceptions of flexible seating. Journal of teacher Action research, 5(2), 120-136.

van den Berg, Y. H. M. et Cillessen, A. H. N. (2015). Peer status and classroom seating arrangements: A social relations analysis. Journal of Experimental Child Psychology, 130, 19-34.

Wannarka, R. et Ruhl, K. (2008). Seating arrangements that promote positive academic and behavioural outcomes : A review of empirical research. Support for Learning, 23(2), 89‑93. https://doi.org/10.1111/j.1467-9604.2008.00375.x