Appel de textes pour le numéro thématique : « Repenser l’évaluation de l’écriture pour mieux soutenir les apprentissages »
Coordonné par Katrine Roussel et Marie-Pier Godin, Département de didactique des langues, UQAM
La maitrise de l’écriture est primordiale pour réussir à l’école et hors d’elle : elle sous-tend plusieurs apprentissages scolaires et facilite l’obtention d’un diplôme ou d’un emploi, permettant ultimement aux citoyennes et citoyens de devenir autonomes et de s’épanouir au sein de la société (Arfé et Dockrell, 2023 ; Chartrand, 2006). Compétence multifonctionnelle, écrire permet de partager ses idées, d’argumenter, de raconter des histoires ou de communiquer avec ses pairs (Graham et Harris, 2019). Or, devenir une scriptrice compétente ou un scripteur compétent ne va pas de soi (Favart et Olive, 2005 ; MÉESR, 2015), comme en font foi les plus récents taux de réussite aux épreuves ministérielles d’écriture au secondaire, inférieurs à 60 % dans plusieurs régions du Québec (Morasse, 2022).
Pour soutenir les élèves dans le développement de cette compétence, les personnes enseignantes doivent être en mesure de dresser pour chaque élève un portait clair et précis de ses connaissances, habiletés et stratégies scripturales et métascripturales, et en faire le suivi à plusieurs moments durant l’année ou le trimestre. Évaluer la compétence scripturale en cours de développement devient alors un moyen incontournable d’y parvenir. Toutefois, pour les milieux scolaires et scientifiques, l’évaluation de l’écriture représente un important défi conceptuel et méthodologique, en plus d’être particulièrement chronophage pour le corps enseignant (De Ketele, 2013 ; Dockrell et al., 2019). En effet, l’évaluation de l’écriture doit couvrir les nombreux aspects qui l’entourent — dont les aspects discursifs, textuels et linguistiques (Daigle et Berthiaume, 2021) —, être adaptée à la réalité particulière de la classe ou de l’institution, et tenir compte des curriculums (Dabène, 1995 ; Rozenwajn et Dumay, 2014 ; cf. MELS, 2011 ; MEQ, 2022), sans parler des attentes élevées de la société en matière de maitrise de la langue écrite (Lefrançois et Brissaud, 2016 ; Lombard, 2012 ; Simard et al., 2019). Pour mieux comprendre les besoins des élèves et mieux orienter les pratiques enseignantes en écriture, ce numéro thématique souhaite à la fois cerner les pratiques d’évaluation actuelles et dégager de nouvelles possibilités évaluatives pour repenser l’évaluation de l’écriture en tant que geste professionnel au service des apprentissages.
S’inscrivant en continuité des deux premières éditions du colloque « Évaluer l’écriture du préscolaire au secondaire : pratiques actuelles et enjeux méthodologiques », qui ont eu lieu dans le cadre des 91e et 92e Congrès de l’Acfas (mai 2024 et 2025), ce numéro thématique poursuit donc l’objectif d’interroger les enjeux actuels liés aux pratiques d’évaluation de l’écriture en contexte scolaire, du préscolaire au secondaire, mais également dans les cours de mise à niveau en français écrit offerts au collégial et à l’université, dans une perspective de soutien aux différents apprentissages scripturaux. Toutes personnes ayant ou non participé au colloque sont invitées à soumettre leur texte si celui-ci s’inscrit dans l’un des axes suivants : 1) quelles pratiques d’évaluation de l’écriture les personnes enseignantes mettent-elles en place dans leurs classes de français pour soutenir le développement de la compétence scripturale ? ; 2) de quelle façon les outils d’évaluation issus de la recherche actuelle peuvent-ils contribuer à mieux soutenir le développement de la compétence scripturale des élèves et à transformer les pratiques didactiques du corps enseignant ? Les contributions ayant pour objet le français, langue d’enseignement, seront priorisées, mais toutes contributions pertinentes inscrites dans le paradigme des langues secondes seront également considérées.
Avec le premier axe, nous souhaitons rassembler des contributions permettant de brosser un portrait des pratiques d’évaluation de l’écriture qui ont cours actuellement dans les classes de français et qui permettent de soutenir les pratiques didactiques en écriture. Recension des écrits, sondage sur les pratiques déclarées, observations en contexte écologique, entretiens auprès d’actrices et acteurs du milieu scolaire, récits de pratiques sont des méthodologies typiquement attendues pour ce premier axe. La relation didactique mise à l’avant-plan serait donc celle de l’interaction entre la personne enseignante-évaluatrice et l’écriture comme objet de savoir à évaluer dans le contexte de la classe de français. À titre indicatif, voici des entrées possibles dans ce premier axe :
- Quelles sont les pratiques d’évaluation de l’écriture visant à soutenir le développement de la compétence scripturale des élèves dans la classe « ordinaire », en classe adaptée ou en contexte orthopédagogique ?
- Comment les enseignantes et enseignants construisent-ils leurs grilles de correction et à quels types de rétroactions recourent-ils dans le but de mieux orienter leurs pratiques didactiques ?
- Quels genres de texte et quelles composantes de l’écriture (affectives, linguistiques, cognitives, etc.) sont évalués en classe de français, langue d’enseignement, et de quelle manière ces choix influencent-ils l’enseignement et l’apprentissage de l’écriture ?
- Quelle place occupe l’évaluation formative dans la didactique de l’écriture et à quelle démarche se rattache-t-elle (sommative, descriptive, interprétative) ?
- Dans quelle mesure le rapport à l’écriture des élèves est-il considéré dans le jugement évaluatif des enseignantes et enseignants ?
Avec le second axe, nous souhaitons rassembler des contributions émergeant, entre autres, de projets de recherche-action, de recherche-développement ou de recherche quasi expérimentale en didactique de l’écriture qui incluent une dimension évaluative. De telles contributions permettront de faire rayonner les innovations d’équipes de recherche qui ont pour objectif de mieux soutenir les enseignantes et enseignants dans l’évaluation de l’écriture ayant pour fonction de soutenir les apprentissages de leurs élèves. Ici, la relation didactique serait donc prise dans son ensemble, incluant la personne enseignante-évaluatrice, la personne apprenante-scriptrice, la compétence en écriture comme objet de savoir à évaluer et la classe comme milieu. Les questions suivantes offrent des angles pour répondre à ce deuxième axe :
- De quelle façon les outils d’évaluation issus de la recherche actuelle peuvent-ils contribuer au développement de la compétence scripturale des élèves et transformer les pratiques didactiques du corps enseignant ?
- Quels outils d’évaluation contribuent à soutenir le développement des compétences scripturales des élèves ?
- Comment l’évaluation de l’écriture peut-elle intégrer les nouvelles technologies numériques comme les systèmes basés sur l’intelligence artificielle générative et soutenir les personnes enseignantes dans leurs pratiques didactiques en écriture ?
- Comment l’évaluation de l’écriture peut-elle prendre en compte les aspects affectifs du rapport à l’écriture et contribuer à soutenir les apprentissages des élèves ?
- Comment l’écriture collaborative ou l’intelligence artificielle peuvent-elles alléger la charge de travail du corps enseignant en lien avec la correction et l’annotation de nombreux textes d’élèves ?
- Comment les élèves s’approprient-ils les grilles de correction de leur enseignante ou enseignant pour améliorer leurs compétences scripturales ?
- Quel rôle les élèves peuvent-ils jouer dans l’évaluation de leurs compétences scripturales en cours d’apprentissage ?
Modalités de soumission
Les prépropositions d’articles (3 pages maximum) devront être envoyées avant le 10 juin 2025 à l’équipe de coordination à l’adresse courriel suivante : roussel.katrine@uqam.ca. Cette étape de présoumission a pour objectif de permettre à l'équipe de coordination de (1) vérifier la qualification possible des projets de textes avant une soumission formelle à la revue ou de (2) fournir aux personnes autrices une rétroaction leur permettant d’augmenter leurs chances de succès par la suite.
Pour chaque préproposition, merci d’indiquer votre nom et votre rattachement institutionnel.
Dates importantes
- Date butoir de réception des prépropositions : 10 juin 2025
- Retour des avis : été 2025
- Envoi de la soumission initiale des articles à la revue (par la plate-forme de soumission): 20 décembre 2025
- Retour prévu des évaluations des articles : février 2026
- Parution prévue : printemps 2026
Rappel relatif aux exigences formelles de la revue Didactique
En cohérence avec ses objectifs, la revue s’attend à la soumission d’articles qui présentent les résultats de recherches empiriques, théoriques ou de recherches-développements, de recensions d’écrits rigoureuses, ou qui présentent des outils ou des méthodologies de recherche utiles à l’avancement des travaux en didactique. Elle refuse les autres types de textes, notamment les articles d’opinion; les propositions qui ne présentent pas de données issues de la réalité; qui ne répondent pas à des questions (ou des objectifs) de recherche explicites; dont la méthodologie n'est pas transparente; ou qui ne réfèrent pas à des arguments externes. Elle ne publie pas non plus les travaux en cours, les positionnements éditoriaux, les revues de littérature non-systématiques, les sondages de satisfaction, les notes de terrain, les résumés critiques ou de congrès.
Références
Arfé, B. et Dockrell, J. E. (2023). Difficulties in acquiring and developing writing skills. Dans A. G. Spinillo et C. Sotomayor (dir.), Development of writing skills in children in diverse cultural contexts: Contributions to teaching and learning (p. 223–240). Springer Nature Switzerland AG. https://doi.org/10.1007/978-3-031-29286-6_10
Chartrand, S.-G. (2006). L’apport de la didactique du français langue première au développement des capacités d’écriture des élèves et des étudiants. Dans J. Lafont-Terranova et D. Colin (dir.), Didactique de l’écrit : la construction des savoirs et le sujet-écrivant (p. 11‑31). Presses universitaires de Namur.
Dabène, M. (1995). La place des représentations, des pratiques sociales et d’une théorie de l’écrit dans un modèle de l’enseignement-apprentissage de l’écriture. Dans Y. Boyer (dir.), La production de textes : vers un modèle d’enseignement de l’écriture (p. 151-173). Logiques.
Daigle, D. et Berthiaume, R. (2021). L’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Décomposer les objets d’enseignement en microtâches pour les rendre accessibles à tous les élèves — 5 à 12 ans. Chenelière éducation.
De Ketele, J.-M. (2013). L’évaluation de la production écrite. Revue française de linguistique appliquée, 1(18), 59-74. https://doi.org/10.3917/rfla.181.0059
Dockrell, J. E., Connelly, V. et Arfè, B. (2019). Struggling writers in elementary school: Capturing drivers of performance. Learning and Instruction, 60, 75-84. https://doi.org/10.1016/j.learninstruc.2018.11.009
Favart, M. et Olive, T. (2005). Modèles et méthodes d’étude de la production écrite. Psychologie Française, 50(3), 273-285. https://doi.org/doi:10.1016/j.psfr.2005.05.012
Graham, S. et Harris, K. R. (2019). Evidence-Based Practices in Writing. Dans S. Graham, C. A. McArthur et M. Hebert (dir.), Best Practices in Writing Instruction (3e éd., p. 3-18). The Gilford Press. https://colegiopspchubut.com.ar/storage/2023/02/Best-Practices-in-Writing-Instruction-Third-Edition.pdf#page=16
Lefrançois, P. & Brissaud, C. (2015). Les exigences linguistiques de quelques systèmes scolaires : une comparaison internationale. Mesure et évaluation en éducation, 38(3), 123–151. https://doi.org/10.7202/1036701ar
Lombard, V. (2012). L’évolution de l’évaluation de la composante linguistique de la compétence à écrire par le ministère de l’Éducation : une étude longitudinale sur les épreuves uniques de 5e secondaire (Mémoire de maitrise inédit). Université de Montréal.
Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MÉESR). (2015). Rapport final d’évaluation. Suivi des apprentissages effectués par les élèves en écriture (2009, 2010 et 2011). Plan d’action pour l’amélioration du français à l’enseignement primaire et secondaire. Gouvernement du Québec. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/4162966
Ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport (MELS). (2011). Cadre d’évaluation des apprentissages. Français langue d’enseignement. Enseignement secondaire, 1er et 2e cycle. Gouvernement du Québec.
Ministère de l’Éducation (MEQ). (2022). Document d’information. Épreuve unique. Français, langue d’enseignement, 5e année du secondaire. Gouvernement du Québec. http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/dpse/evaluation/DI_FLE_5e_sec_2022-2023.pdf
Morasse, M.-È. (2022). Épreuve uniforme de 2022 : Dégringolade en français écrit. La Presse, 23 janvier. https://www.lapresse.ca/actualites/education/2023-01-23/epreuve-uniforme-de-2022/degringolade-en-francais-ecrit.php
Rozenwajn, E. et Dumay, X. (2014). Les effets de l’évaluation externe sur les pratiques enseignantes : une revue de la littérature. Revue française de pédagogie, 189, 105-138. https://doi.org/10.4000/rfp.4636
Simard, C., J.-L, Dufays, J. Dolz et C. Garcia-Debanc. (2019). Didactique du français langue première (2e éd.). De Boeck.